ETXERAT (16-12-2020). L’association Etxerat s’est jointe à l’initiative de collectifs et d’associations de l’État espagnol qui travaillent pour les droits des prisonniers et pour les droits humains, en l’occurrence pour l’abolition de l’isolement et du premier degré. Aujourd’hui encore, plus d’une centaine de prisonnier.e.s politiques basques se trouvent au premier degré, le régime le plus restrictif dans les prisons espagnoles. Voici le document sur lequel est basée cette campagne et que nous rendons public aujourd’hui.
Les conditions de vie en prison n’ont jamais été saines et ne pourront jamais l’être. Pas seulement à cause du suivi médical insuffisant: l’enfermement prolongé atteint profondément la psyché des personnes. La rupture des liens avec les autres et la stigmatisation sociale sont des conséquences souvent irréversibles de l’enfermement. Une période d’incarcération a aussi des conséquences physiques, en plus des effets psychologiques : engourdissement musculaire, perte de vision, d’odorat et d’ouïe à long terme, sont quelques-unes des séquelles physiques que subissent les personnes après avoir passé un laps de temps en prison. Tout cela est particulièrement aggravé pour les presque 1.000 personnes prisonnières qui purgent leur peine sous le régime de l’isolement pénitentiaire, plus celles qui sont placées en isolement comme limitation du régime pour différentes raisons : sanctions, mesures coercitives, etc.
Le régime d’isolement pénitentiaire implique une limitation des sorties en promenade (entre 2 et 4 heures par jour, ou jusqu’à 6 heures en Catalogne, région qui détient la compétence politique en matière d’application des peines, bien que cette durée ne soit pas toujours garantie), limitation des contacts avec les autres personnes prisonnières, fouilles quotidiennes, changements incessants de cellules, limitation du nombre d’objets autorisés en cellule, repas en solitaire, restriction des contacts avec les fonctionnaires, refus des permis de sortie, restriction des communications avec des personnes de l’extérieur (limitation du courrier à 2 lettres par semaine), refus ou limitation des activités culturelles, artistiques et spirituelles. Le manque de contacts humains et d’activités entraînent un sérieux préjudice sur la santé physique et mentale de ceux qui le subissent, quand il n’en finit pas directement et définitivement avec leurs vies. De plus, il s’agit d’espaces favorisant souvent les abus de la part des fonctionnaires. Il est évidemment impossible de penser à l’éducation ou à la rééducation des personnes prisonnières dans ces conditions.
De plus, le régime d’isolement pénitentiaire est habituellement appliqué en contradiction avec la législation qui le régule, et toujours en violation des droits des personnes qui y sont soumises selon ce qui est établi à ce sujet dans les traités internationaux. Il s’agit de restrictions de droits régulées dans des instructions, circulaires et notes de service. Le régime d’isolement pénitentiaire affecte les personnes classifiées au régime du premier degré qui accomplissent leur peine dans des modules de régime fermé, les personnes enfermées dans des départements spéciaux, ainsi que de nombreuses personnes classifiées dans les groupes FIES. Il est également utilisé comme sanction pour les fautes très graves, ce qui en fait une prison dans la prison. L’interdiction expresse d’appliquer des sanctions d’isolement au-delà de 14 jours est clairement violée dans les prisons de l’État malgré les constantes recommandations et dénonciations d’organismes aussi bien nationaux qu’internationaux.
Pour toutes ces raisons, l’isolement pénitentiaire implique un traitement cruel, inhumain et dégradant envers les personnes, et constitue en soi une forme de torture. Les associations et collectifs signataires considèrent donc qu’il est indispensable d’en finir avec le régime d’isolement. En ces moments où plus que jamais, les personnes prisonnières sont abandonnées et les postes de personnel sanitaire sont toujours vacants (problème qui existe en Catalogne de façon beaucoup moins importante que dans les autres communautés autonomes), il faut avancer vers l’abolition de l’isolement pénitentiaire.